Un p’tit assortiment de pépites de la littérature jeunesse

La littérature jeunesse est une littérature de l’oralité. C’est même l’un de ses principaux modes de lecture et de transmission, en particulier pour les publications destinées aux plus jeunes, pas encore lecteurs (mais ça marche aussi pour les « déjà lecteurs » qui, ne l’oublions pas, aiment toujours qu’on leur lise des histoires !).

Certains ouvrages sont même carrément taillés sur mesure pour ça ! Avec leur texte savoureux, qui prend son envol à l’oral, ils font de la langue un formidable terrain de jeu. Des textes qui s’amusent avec les mots, les intonations, les sons… Ils en mettent plein les oreilles de celles et ceux qui écoutent et offrent de joyeux moments de lecture partagée.

Roule ma poule d’ Edouard Manceau (Editions Milan), c’est l’histoire tragi-comique d’une sacrée poule qui finira bien amochée suite à une descente vertigineuse « en roule boule boule ». Livre cocasse et loufoque, prétexte aux rimes et aux allitérations en « ou » et en « l », les plus jeunes apprécient beaucoup les aventures « maboules » de cette poule et en redemandent. Une fameuse poule à retrouver dans Le pull de ma poule qui continuera à vous mettre des rimes et des mots qui s’enroulent plein la bouche.

Charlie est un jeune tigre qui a pris du grade : depuis ce matin, il est le nouveau shérif de la ville de Cactus Valley et il a perdu sa première dent ! Bon… En contrepartie, il a gagné un léger « zozotement » qui ne va pas lui faciliter la tâche face aux gangsters. Difficile d’être pris au sérieux quand on se présente comme le « férif »… Les quiproquos s’enchaînent, personne ne le comprend, quel découragement ! Mais ces mots tordus s’avèrent finalement être un atout majeur dans sa manche. Le méchant des méchants, Jack le Cornu, trop occupé à se moquer, baisse sa garde… Charlie : 1 – Jack : 0, et un nouveau shérif qui a su asseoir sa légitimité. Quentin Gréban reprend admirablement, en les adoucissant, les codes du western, entre banque, saloon, stetson, banjo et pistolets…à bouchons ! Et quelle jubilation pour les petites oreilles et les petits yeux d’accompagner Charlie sur son « femin » de poor lonesome « férif » et de le voir triompher des plus grands.

Mè keskeussè keu sa ? de Michel Van Zeveren : le titre est déjà toute une promesse, qui sera tenue haut la main tout au long du livre. Nous voici chez Kiki et Koko, un couple préhistorique qui trouve un beau matin un bébé à l’entrée de la grotte. Complètement démunis face à cette étrange créature dont ils ignorent la nature et qu’ils appellent « Crasse » car elle traînait par terre, on les voit échanger leurs doutes et leurs questionnements, leurs remarques sur Crasse dans un langage tout « préhistorique ». Cela donne lieu à un moment de lecture à haute voix réjouissant, où l’on s’amuse à incarner les personnages (si on est assez, on peut distribuer les trois rôles) et où l’on voit Crasse devenir petit à petit le « Titamour » de Kiki et Koko. L’histoire tendre et amusante de la naissance de cette drôle de famille.

-Un livre conçu pour être lu à être voix si l’adulte que vous êtes est prêt à se « ridiculiser » : c’est Le livre sans images (B.J. Novak, L’école des loisirs). Sur la quatrième de couverture, on est prévenus : « ATTENTION ! Ce livre a l’air sérieux mais en vérité il est complètement absurde. Si un enfant essaie de vous obliger à le lire, sachez que cet enfant est en train de vous tendre un piège ». Et on se laisse volontiers prendre au piège de ce livre-jeu dont l’unique finalité est de faire dire à qui voudra bien s’y prêter des phrases et des bruits loufoques, car quand on lit un livre à un enfant « tous les mots écrits dans le livre doivent être dits à haute voix par la personne qui fait la lecture ». On se retrouve ainsi à devoir parler comme un singe robot ou à expliquer que notre seul copain sur Terre est un hippopotame qui s’appelle Gros Patapouf, le tout sans sourciller, pour le plus grand plaisir de l’enfant qui écoute. Le point de vue du narrateur adulte, qui souffre terriblement de devoir faire de telles « idioties », est aussi exprimé dans le livre : en général plus on théâtralise, plus la joie des enfants est grande ! Un album insolite, qui fait vivre le plaisir de la lecture à haute voix pour elle-même.

Roule ma poule, Edouard Manceau, Âge : 2 +, Pages : 48, ISBN : 9782745994707, Publication : 2018 – 9,90 €, Éditions Milan

Charlie, Quentin Gréban, Âge : 4 +, Pages : 28, ISBN : 978-2-87142-905-0, Publication : 2015 – 12 €, Éditions Mijade

Mè keskeussè keu sa ?, Michel Van Zeveren, Âge : 3+, Pages : 40, ISBN : 9782211227063, Publication : 2016 – 13,50 €, L’École des loisirs

Le livre sans images, B.J. Novak, Âge : 6+, Pages : 56, ISBN : 9782211225915, Publication : 2015 – 13 €, L’École des loisirs


3 réponses à « Donner de la voix »

  1. Avatar de bouchdesbois
    bouchdesbois

    Le livre sans images est un must have, chez nous ! Je ne compte plus le nombre de fois où mes enfants me l’ont réclamé à corps et à cris 😅 je note les autres, ils ont l’air tout aussi savoureux !

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  2. Avatar de bouchdesbois
    bouchdesbois

    Le livre sans images est un des albums préférés de mes enfants : je ne compte plus le.nombre de soirs où ils me l’ont réclamé à corps et à cris ! Je note les autres, qui m’ont l’air tout aussi savoureux 🥰

    Aimé par 1 personne

  3. Avatar de C’est la fin du mois : on fait le bilan ! – La triade littéraire de Velaris

    […] de Clytemnestre et de Psyché et Eros, un joli trio ! Nous avons été ravies de découvrir le blog Des p’tits bouquins qui regorgent de bonnes idées lectures pour les plus – et moins ! – jeunes, comme avec […]

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