Un p’tit assortiment de pépites de la littérature jeunesse

Retour de la bibliothèque. Au menu de la pêche miraculeuse, une histoire de poney pas paresseux, une histoire de poney un peu paresseux, une histoire de paresseux qui n’a sûrement jamais vu de poney mais qui en connaît un rayon sur d’autres animaux…

– Bon, Pony n’est pas à proprement parler une « histoire de poney ». C’est avant tout l’histoire de Silas, le narrateur, jeune garçon de 12 ans orphelin de mère qui vit dans l’Amérique des années 1860. Pony, c’est un formidable roman initiatique aux accents surnaturels qui nous raconte l’épopée de ce jeune héros à la poursuite de son père, enlevé au beau milieu de la nuit par une bande de malfrats.

Depuis toujours, Silas se sent différent et possède une connexion toute particulière avec le monde des morts. Depuis toujours, il est accompagné par Mittenwool, le fantôme d’un adolescent sans souvenirs, à la fois confident, partenaire de jeux et ange gardien. Le monde des vivants, c’est une autre paire de manche pour Silas. Il n’en a pas les codes et s’y sent maladroit, pataud, pas à sa place.

Mais cet enlèvement/événement déclencheur va changer la donne et le pousser au plus profond de la forêt et de lui-même, sur le dos de Pony, un curieux petit cheval qui semble parfaitement le comprendre et faire corps avec lui. D’autres personnages à la nature changeante, inquiétante ou enveloppante, l’accompagneront également sur ce chemin d’apprentissage et sur les traces de son passé familial, de ce père vénéré et de cette mère point d’interrogation.

R.J. Palacio organise ce récit haletant en 11 grands chapitres introduits par des photos d’archive collectées au fil des années (elle parle très bien de sa démarche dans ses notes en fin de livre) qui contribuent aussi à créer l’atmosphère singulière du roman : on se retrouve véritablement les yeux dans les yeux avec ces fantômes du passé. Les 10 premiers chapitres sont consacrés à la quête de Silas, comme 10 pas que nous faisons à ses côtés dans cette renaissance parmi les vivants (ça me fait penser aux 10 pas d’un duel, qu’on fait avant de se retourner pour faire face à la réalité).

Un roman qui s’inscrit dans son cadre historique, innervé de références à la colonisation des Etats-Unis, à la guerre de Sécession, à l’esclavage, à l’invention de la photographie. Un roman comme un voyage au Far West, avec des faux-monnayeurs, un marshall, un shérif et son adjoint, des chapeaux, des cavalcades, des échanges de tirs et pourtant sans lieux communs et grosses ficelles. Enivrant/envoûtant!

– Avec Tarzan, Poney méchantUn amour de compète, on change complètement de registre et on débarque de plain-pied dans un tourbillon d’humour.

Tarzan n’aime personne (à part peut-être Jeanne, sa cavalière, qu’il surnomme « affectueusement » la Boulette et Django, sa mouche de compagnie) et il n’en a rien à faire de votre avis. Tarzan veut se sentir libre d’aller où bon lui semble (par exemple, sur le terrain de foot à côté du Club équestre pour le transformer en pumptrack) et de brouter à l’envie de délicieuses aiguilles de sapin. Tarzan a un petit bidon et il s’en porte très bien, merci! Bref, Tarzan est MÉCHANT!!!

Alors, lorsqu’on lui annonce qu’il va participer à une compétition équestre en bord de mer avec voyage en van et grand rassemblement amical en mode «tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil », Tarzan n’est pas franchement ravi…

Ce journal de bord d’un poney misanthrope qui découvre à son corps défendant son grand cœur est une réussite de dynamisme et de drôlerie, organisée en chapitres courts qui s’enchaînent à un rythme fou. La plume hilarante de Cécile Alix, qui a sûrement dû croiser quelques poneys rétifs dans sa vie, fabrique à merveille ce personnage épris de liberté, champion de râlerie toute catégorie.

On en redemande et ça tombe bien, parce qu’apparemment, c’est une série !

On verra demain ou l’histoire d’un paresseux qui aimait procrastiner. Derrière la figure du paresseux, incarnée par Paco qui prend le temps de vivre selon ses envies, une ode à la lenteur et au détachement dans un monde où les contraintes s’empilent. Paco est libre (de dormir!) et se montre imperméable à toute forme d’injonction.

Malheureusement, cet équilibre vole en éclats lorsque débarque une bande de castors bien décidés à déforester à tout va pour construire un barrage sur la rivière. L’immobilité de Paco devient alors de l’immobilisme et il laisse ses camarades se faire déloger sans même réaliser ce qui se joue de l’autre côté de ses paupières fermées. Quand son arbre devient le dernier refuge de ce qui était une forêt, c’en est fini des lendemains qui chantent.

Pour préserver son milieu et son mode de vie, Paco va se la jouer Shéhérazade et conter aux castors les merveilles de son arbre magique, royaume de biodiversité avec ses grenouilles bleues, ses phasmes brindilles, ses papillons majestueux et ses oiseaux au plumage arc-en-ciel. L’auditoire bien accroché en redemande, mais pour la suite de l’histoire… on verra demain!

Un album beau et malin de Michaël Escoffier et Kris Di Giacomo pour réaliser qu’il n’est jamais trop tard pour ouvrir les yeux… mais qu’il est bon tout de même de les fermer de temps en temps pour une bonne sieste!

Pony, R.J. Palacio (traduit de l’anglais par Isabelle Chapman), Âge : 11+, Pages : 336, ISBN : 9782075170468, Publication : août 2023 – 17,50 €, Gallimard jeunesse

Tarzan, Poney méchantUn amour de compète, Cécile Alix et Chiara Baglioni, Âge : 8+, Pages : 192, ISBN : 9782377421473, Publication : 2021 – 9,95 €, Poulpe Fictions

– On verra demain, Michaël Escoffier et Kris Di Giacomo, Âge : 3+, Pages: 32, ISBN : 9782877678261, Publication : 2014 – 13 €, Éditions Kaléidoscope


Une réponse à « A la bibli #3 : 2 poneys, 1 paresseux »

  1. Avatar de Fanicia

    Encore trois beaux albums qui me font rêver! Merci pour ce bel article 😁

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